Bien que longtemps négligée, la nature des sols jouerait un rôle dans l'efficacité de la capture de CO2 par les végétaux. Ce paramètre pourrait avoir un effet significatif sur l'évolution de la concentration du dioxyde de carbone dans l’atmosphère.
La concentration en CO2 dans l’atmosphère ne cesse de croître depuis plusieurs dizaines d’années. Elle était environ de 260 à 280 parties par million (ppm) avant la révolution industrielle, serait de 380 ppm à ce jour et pourrait atteindre 500 ppm dans quelques décennies.
Des expériences ont déjà été menées pour comprendre les effets qu’une telle augmentation pourrait avoir sur les écosystèmes, notamment sur les végétaux situés à la base des chaînes alimentaires. Elle provoquerait par exemple une amélioration de la croissance des plantes en dopant l’activité de la photosynthèse (un processus métabolique consommant du CO2) et des changements d’espèces dominantes. Les organismes sachant tirer profit de la libération massive de ce gaz à effet de serre prendraient alors le dessus. Mais un facteur a souvent été négligé dans ces études : la nature du sol.
Il jouerait pourtant un rôle prépondérant d'après des scientifiques américains dirigés par Philip Fay, de l'USDA-ARS Grassland Soil and Water Research Laboratory (QSWRL), qui viennent de publier leurs conclusions dans la revue Nature Climate Change. Cette équipe a étudié la réponse de plantes herbacées à des changements atmosphériques induits par l’Homme. Les herbes ont été cultivées sur trois types de sols recouvrant près 20 % de la surface des terres émergées de la Planète. Certains résultats indiquent que l’augmentation de la concentration en CO2 atmosphérique pourrait s’accélérer dans le futur.
Des analyses de sol pour prédire le climat ?
Les végétaux ont été cultivés dans des chambres expérimentales situées à l’extérieur durant 4 ans. Elles abritaient chacune une concentration différente de dioxyde de carbone, entre 250 et 500 µl/l d’air. Les 60 échantillons de sol étaient de nature argileuse, limonoargileuse ou de type loam (un mélange de limon, d'argile et de sable). On a mesuré les conséquences de l’augmentation de la concentration du gaz à effet de serre dans l’atmosphère en déterminant la productivité primaire nette hors sol des plantes, aboveground net primary productivity (ANPP) en anglais.
L’ANPP a augmenté linéairement d’un facteur 2,5 entre des concentrations en CO2 de 250 et 500 µl/l d’air sur les sols limonoargileux et loam. Cette croissance s’est accompagnée d’un changement des espèces dominantes. En revanche, la productivité des plantes produites sur le sol argileux, dans les mêmes conditions expérimentales, a seulement été multipliée par 1,6. Elle semble avoir atteint un niveau de saturation lorsque les plantes ont été exposées au taux actuel de CO2 atmosphérique.
Les implications de ce résultat sont importantes. Ces végétaux ne seraient plus en mesure de capturer du carbone excédentaire. La concentration en dioxyde de carbone atmosphérique pourrait croître beaucoup plus rapidement que par le passé. Il est donc d’une importance capitale d’intégrer la nature des sols dans les modèles de prévision cherchant à comprendre les conséquences de nos pollutions sur notre environnement et sur le réchauffement climatique.
La réponse des communautés végétales a été élevée sur des sols présentant naturellement un fort taux d’humidité et où les effets directs de l’augmentation de la concentration en CO2 (comme une meilleure photosynthèse) ont été complétés par des effets indirects. Dans le loam, il s'agit d'une importante augmentation du taux d’humidité et sur le sol limonoargileux, cet effet indirect vient des changements d’espèces dominantes au profit d’organismes plus productifs. Ces effets secondaires, n'ayant pas touché les milieux argileux, seraient liés à diverses propriétés des sols, dont leur granulométrie, impactant leurs capacités à retenir l’eau et l’humidité et à les délivrer aux plantes.
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